Il fait toujours aussi gris et peut-être plus froid encore, mais à Paris on peut aussi aller au théâtre. Ce sera le sujet de ce dernier chapitre (de l'année) sur la "vie parisienne".
J'ai toujours besoin d'une sorte de motivation particulière pour aller au théâtre. Et là, coup sur coup j'ai vu deux pièces fort différentes mais qui m'ont toutes deux beaucoup plu.
Tout d'abord, une pièce (de près de 3 heures sans entracte) de Christophe Honoré (plus connu comme metteur en scène de cinéma que comme auteur et metteur en scène de théâtre) intitulée "Nouveau roman". On pouvait s'attendre au pire... Je m'attendais à n'y voir que des profs de lettres en retraite dans le meilleur des cas! Bien qu'il s'agisse d'une représentation supplémentaire, ce qui était plutôt bon signe, je restais inquiète. Oh surprise, la moyenne d'âge dans la salle était d'environ 30 ans, c'est à dire, pas des élèves amenés de force par leurs profs, ni des profs en mal de distraction supposée intellectuelle.
Certains des auteurs du Nouveau Roman"(Robbe-Grillet, Claude Simon, Claude Mauriac, Jérôme Lindon, leur éditeur, Robert Pinget, Samuel Beckett, Nathalie Sarraute et Claude Ollier) sont représentés sur cette photo d'époque.
Christophe honoré leur a redonné vie et jeunesse sous une toute autre forme. Et il gagne le pari, ( en partie grâce aux nouvelles technologies), et je ne me suis pas ennuyée une seconde : les acteurs, jeunes, jouent des personnages avec lesquels ils n'ont aucune ressemblance physique, ne racontent pas l'histoire d'un mouvement littéraire, ni celle des romans d'auteurs plus ou moins connus du grand public. Non, ils s'interpellent, ne délivrent pas de grandes vérité sur l'art, s'interrogent et se répondent avec vigueur et souvent humour. Récit, extraits de textes, interviews vidéos d'écrivains d'aujourd'hui, extraits de films, chansons et improvisation (en interaction avec quelques spectateurs) font de l'ensemble un spectacle jubilatoire qui donne envie de (re)lire la plupart de ces auteurs souvent inconnus ou mal compris.
Nathalie Sarraute (Ludivine Sagnier) chante accompagnée à la guitare par Claude Mauriac (Julien Honoré, le frère de Christophe)
Marguerite Duras est ici portée par Alain Robbe-Grillet, Claude Ollier, Claude Mauriac et Robert Pinget! Ce n'est pas toujours comme ça qu'on se l'imagine, même jeune...
Ce café qui leur sert parfois de repaire rappelle encore Hopper (ou c'est peut-être chez moi une sorte d'obsession...)
La pièce hélas ne passe plus à Paris mais encore les 10-11 et 12 janvier à Toulon, et les 17 et 18 janvier à Perpignan. Ils auraient pu être plus ambitieux mais sans doute ne s'attendaient-ils pas à un tel succès avec un sujet réputé ennuyeux.
Je suis, quelques jours plus tard, passée à toute autre chose. Il s'agit du théâtre Hébertot, un superbe petit théâtre à l'italienne comme nous les aimons tant à Paris.
La pièce, de Florian Zeller, jeune auteur français, "Le père", a été écrite pour Robert Hirsch, et moi, bien sûr, je suis venue voir cet immense comédien. Le sujet de la pièce est âpre (vieillesse et confusion mentale) et la mise en scène assez habile mimant la confusion qui règne dans l'esprit de son héros. C'est parfois drôle, souvent très émouvant et Robert Hirsch excelle dans le rôle.
Robert Hirsch à 87 ans est encore, bien sûr, un comédien magnifique. Venu de la danse classique (quelle école!), il est resté plus de 25 ans à la Comédie Française. Il s'agit là de références qui expliquent un peu son aisance, son exigence, son irréprochable professionnalisme. Il a eu un succès à la hauteur de sa prestation.
Personnellement, je l'avais adoré dans le rôle d'Oronte (
Le misanthrope, mis en scène de Francis Huster et dans celui de Pozzo (
En attendant Godot, de Samuel Beckett, mise en scène de Patrice Kerbrat)
Il peut encore tout jouer. Chapeau l'artiste!